En 1951, alors qu'il a seulement 20 ans, Stirling Moss entame un des plus importants voyages de sa carrière.
Après avoir très bien fait dans des séries junior, Enzo Ferrari l'invite à Bari pour qu'il puisse participer à quelques courses, question d'évaluer son potentiel. Cependant, le voyage ne se déroula pas comme prévu : les conséquences iront affecter tout son cheminement en Formule 1, et ce jusqu'à l'accident qui mettra un terme à sa carrière une décennie plus tard.
"Lorsque vous avez 20 ans et qu'on vous demande de rencontrer Ferrari, c'est énorme", l'octogénaire Moss raconte
Stirling Moss est presque devenu un pilote Ferrari en 1962
"Ferrari souhaitait que je me rende dans le sud de l'Italie pour piloter le nouveau quatre-cylindres conçu pour la Formule 2", continue le Britannique. "Je m'y suis rendu et j'ai trouvé la voiture dans un garage. Je me suis installé dans le cockpit et un ingénieur s'est alors présenté : 'Qu'est-ce que tu fais là ?' J'ai répondu : "Je suis Stirling Moss, je suis venu piloter cette voiture.' L'ingénieur m'a immédiatement répondu : 'Non, pas toi. Piero Taruffi, oui.'"
"J'étais très en colère. Taruffi était un chic type et un bon pilote, mais Enzo Ferrari avait simplement changé d'idée sans me le dire. J'ai juré de ne jamais piloter pour lui."
Il s'agit d'une réaction spontanée, certains diront téméraire, mais Moss tient parole. Au cours des 11 années suivantes, des pilotes Ferrari remportent cinq championnats tandis que Moss n'en décroche aucun. Il est vice-champion quatre fois ; deux fois, il talonne un pilote Ferrari par une poignée de points. Mais il préfère travailler avec Mercedes, Maserati et l'écurie privée Rob Walker plutôt que le Cheval cabré.
Moss au volant d'une Ferrari 250 GT SWB de l'équipe Ron Walker
Soulignons que parallèlement, Moss court et gagne aux commandes de voitures de sport Ferrari. Mais les inscriptions sont toujours privées, jamais celles d'Enzo lui-même. "J'ai couru 13 fois avec une Ferrari", se souvient-il. Mis à part deux courses, il les a toutes remportées : "Alors ma carrière Ferrari a été assez bonne."
En 1961, Ferrari domine la F1 grâce à son moteur V6 Dino installé dans le châssis de la toute nouvelle 156 'Sharknose' (museau de requin). Pendant ce temps-là, plusieurs écuries doivent se contenter de moteurs Climax de la F2 : c'est le cas de la Rob Walker Lotus que pilote Moss.
Pourtant, Moss est le seul pilote capable de battre les redoutables requins rouges en 1961 : il signe une belle victoire à Monaco et une autre au Nürburgring. Le grand patron de Ferrari est impressionné. Un nouveau moteur V8 Climax est attendu en 1962 et il pourrait faire la vie dure à la Scuderia. Enzo met son orgueil de côté et approche Moss.
"À la fin de 1961, je me suis rendu à Modène et Ferrari m'a dit : 'Si tu me dis quelle voiture tu veux, je la construirai pour toi.' J'ai dit : 'Je veux une 250 GTO aux couleurs de l'équipe BRP (fondée par son père) et une 156 aux couleurs de l'équipe Rob Walker. Ensuite je piloterai pour vous.' Il a accepté."
La fameuse Ferrari 156 'Sharknose'
La proposition de Ferrari est remarquable et démontre bien le respect dont jouit Moss. Le scénario prévu pour 1962 s'annonce sans précédent : une Ferrari bleue foncée avec bande blanche sur le museau, fabriquée selon les mêmes standards que l'équipe officielle, et probablement plus rapide. Mais les espoirs de Moss et Ferrari prennent fin dans un terrible accident à Goodwood, en Angleterre, lors du congé pascal de 1962.
Puisque Moss attend toujours la livraison de sa Ferrari, il pilote sa Lotus 18. Il s'était qualifié en pole position, mais un problème de boîte de vitesses le relègue à deux tours du leader Graham Hill. Alors qu'il tente de regagner le terrain perdu, sa Lotus quitte la piste à très haute vitesse. Moss, inconscient et gravement blessé, est emprisonné dans l'épave de sa voiture.
Les raisons exactes de l'accident demeurent inconnues ; lorsque Moss sort du coma un mois plus tard, il ne s'en souvient pas. Encore aujourd'hui, il demeure convaincu que les choses se seraient passées autrement s'il avait été au volant d'une Ferrari.
"Si la voiture avait été prête, je suis certain que je n'aurais pas eu cet accident à Goodwood", dit-il. "Je suis fermement convaincu que l'accident est relié à la Lotus. Les Ferrari ne cassaient jamais."
La carrière F1 de Moss a pris fin à Goodwood en 1962
"Le résultat de cet accident, c'est que j'ai dû me trouver un travail à 32 ans alors que je ne connaissais rien d'autre. Je peux vous dire que c'est un grand choc."
Lorsque le championnat 1962 débute, les Ferrari 156 ne sont plus aussi compétitives qu'auparavant face au nouveau moteur de ses rivales ; la Scuderia ne remporte aucune course. La défaite est attribuée à la migration de membres-clés de l'équipe vers d'autres écuries, mais aussi aux ressources qui seraient trop étirées entre les monoplaces F1 et les voitures de course.
Ferrari dira plus tard que le rendez-vous manqué avec Moss leur aura coûté beaucoup de victoires au cours des années. Moss, quant à lui, regrette la décision colérique de ses 20 ans.
"Oui, je dois dire que mon plus grand regret est de n'avoir jamais piloté pour Ferrari", avoue-t-il. "Si vous regardez l'histoire de Ferrari, sauf pour l'exception possible d'Alberto Ascari car nous ne savons pas vraiment ce qui est arrivé, je ne peux penser à aucun accident où la voiture a provoqué la mort d'un pilote."
Après avoir très bien fait dans des séries junior, Enzo Ferrari l'invite à Bari pour qu'il puisse participer à quelques courses, question d'évaluer son potentiel. Cependant, le voyage ne se déroula pas comme prévu : les conséquences iront affecter tout son cheminement en Formule 1, et ce jusqu'à l'accident qui mettra un terme à sa carrière une décennie plus tard.
"Lorsque vous avez 20 ans et qu'on vous demande de rencontrer Ferrari, c'est énorme", l'octogénaire Moss raconte
Stirling Moss est presque devenu un pilote Ferrari en 1962
"Ferrari souhaitait que je me rende dans le sud de l'Italie pour piloter le nouveau quatre-cylindres conçu pour la Formule 2", continue le Britannique. "Je m'y suis rendu et j'ai trouvé la voiture dans un garage. Je me suis installé dans le cockpit et un ingénieur s'est alors présenté : 'Qu'est-ce que tu fais là ?' J'ai répondu : "Je suis Stirling Moss, je suis venu piloter cette voiture.' L'ingénieur m'a immédiatement répondu : 'Non, pas toi. Piero Taruffi, oui.'"
"J'étais très en colère. Taruffi était un chic type et un bon pilote, mais Enzo Ferrari avait simplement changé d'idée sans me le dire. J'ai juré de ne jamais piloter pour lui."
Il s'agit d'une réaction spontanée, certains diront téméraire, mais Moss tient parole. Au cours des 11 années suivantes, des pilotes Ferrari remportent cinq championnats tandis que Moss n'en décroche aucun. Il est vice-champion quatre fois ; deux fois, il talonne un pilote Ferrari par une poignée de points. Mais il préfère travailler avec Mercedes, Maserati et l'écurie privée Rob Walker plutôt que le Cheval cabré.
Moss au volant d'une Ferrari 250 GT SWB de l'équipe Ron Walker
Soulignons que parallèlement, Moss court et gagne aux commandes de voitures de sport Ferrari. Mais les inscriptions sont toujours privées, jamais celles d'Enzo lui-même. "J'ai couru 13 fois avec une Ferrari", se souvient-il. Mis à part deux courses, il les a toutes remportées : "Alors ma carrière Ferrari a été assez bonne."
En 1961, Ferrari domine la F1 grâce à son moteur V6 Dino installé dans le châssis de la toute nouvelle 156 'Sharknose' (museau de requin). Pendant ce temps-là, plusieurs écuries doivent se contenter de moteurs Climax de la F2 : c'est le cas de la Rob Walker Lotus que pilote Moss.
Pourtant, Moss est le seul pilote capable de battre les redoutables requins rouges en 1961 : il signe une belle victoire à Monaco et une autre au Nürburgring. Le grand patron de Ferrari est impressionné. Un nouveau moteur V8 Climax est attendu en 1962 et il pourrait faire la vie dure à la Scuderia. Enzo met son orgueil de côté et approche Moss.
"À la fin de 1961, je me suis rendu à Modène et Ferrari m'a dit : 'Si tu me dis quelle voiture tu veux, je la construirai pour toi.' J'ai dit : 'Je veux une 250 GTO aux couleurs de l'équipe BRP (fondée par son père) et une 156 aux couleurs de l'équipe Rob Walker. Ensuite je piloterai pour vous.' Il a accepté."
La fameuse Ferrari 156 'Sharknose'
La proposition de Ferrari est remarquable et démontre bien le respect dont jouit Moss. Le scénario prévu pour 1962 s'annonce sans précédent : une Ferrari bleue foncée avec bande blanche sur le museau, fabriquée selon les mêmes standards que l'équipe officielle, et probablement plus rapide. Mais les espoirs de Moss et Ferrari prennent fin dans un terrible accident à Goodwood, en Angleterre, lors du congé pascal de 1962.
Puisque Moss attend toujours la livraison de sa Ferrari, il pilote sa Lotus 18. Il s'était qualifié en pole position, mais un problème de boîte de vitesses le relègue à deux tours du leader Graham Hill. Alors qu'il tente de regagner le terrain perdu, sa Lotus quitte la piste à très haute vitesse. Moss, inconscient et gravement blessé, est emprisonné dans l'épave de sa voiture.
Les raisons exactes de l'accident demeurent inconnues ; lorsque Moss sort du coma un mois plus tard, il ne s'en souvient pas. Encore aujourd'hui, il demeure convaincu que les choses se seraient passées autrement s'il avait été au volant d'une Ferrari.
"Si la voiture avait été prête, je suis certain que je n'aurais pas eu cet accident à Goodwood", dit-il. "Je suis fermement convaincu que l'accident est relié à la Lotus. Les Ferrari ne cassaient jamais."
La carrière F1 de Moss a pris fin à Goodwood en 1962
"Le résultat de cet accident, c'est que j'ai dû me trouver un travail à 32 ans alors que je ne connaissais rien d'autre. Je peux vous dire que c'est un grand choc."
Lorsque le championnat 1962 débute, les Ferrari 156 ne sont plus aussi compétitives qu'auparavant face au nouveau moteur de ses rivales ; la Scuderia ne remporte aucune course. La défaite est attribuée à la migration de membres-clés de l'équipe vers d'autres écuries, mais aussi aux ressources qui seraient trop étirées entre les monoplaces F1 et les voitures de course.
Ferrari dira plus tard que le rendez-vous manqué avec Moss leur aura coûté beaucoup de victoires au cours des années. Moss, quant à lui, regrette la décision colérique de ses 20 ans.
"Oui, je dois dire que mon plus grand regret est de n'avoir jamais piloté pour Ferrari", avoue-t-il. "Si vous regardez l'histoire de Ferrari, sauf pour l'exception possible d'Alberto Ascari car nous ne savons pas vraiment ce qui est arrivé, je ne peux penser à aucun accident où la voiture a provoqué la mort d'un pilote."
. Il a eu beaucoup de chance Sir Stirling Moss!!
